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Bohemians, Une histoire graphique des avant-gardes artistiques aux États-Unis – Paul Buhle & David Berger

Bohemians, une histoire graphique des avant-gardes artistiques aux États-Unis, est paru aux Éditions Nada en septembre dernier.

Coordonné par Paul Buhle et David Berger, l’ouvrage compte 22 contributeurs, auteurs, dessinateurs et traducteurs.
Parmi eux, de grands noms de la bande dessinée underground américaine, Spain Rodriguez, Peter Kuper, Sharon Rudahl, Jeffrey Lewis etc.
Il est traduit par Jean-Christophe Bardeaux pour la présente édition.

Bohemians est un panorama en neuf chapitres chronologiques, très justement introduits, constitué de portraits, d’anecdotes, d’extraits d’œuvres ou de poèmes, tous pertinents, bien que forcément trop courts. Une parfaite introduction à la vie, l’œuvre et la pensée d’artistes et de penseurs révolutionnaires en leur temps et une célébration de l’effervescence créative de quartiers tels que Harlem ou Greenwich Village.

Le livre montre très bien les liens, tantôt lâches tantôt très étroits entre la création artistique et les (r)évolutions sociales.
Les avant-gardes artistiques ont revendiqué puis accompagné l’évolution des mœurs et des rapports de domination, dans la sphère privée comme dans les rapports de classes. L’amour libre et le communisme ont ainsi été au cœur des œuvres et des pensées de beaucoup d’artistes américains, face aux conservatismes, à la ségrégation et au capitalisme.
Bohemians donne également à voir que rien n’a changé depuis le XIXème siècle où la libre-pensée et le non-conformisme étaient parfois vécus comme des passades avant l’accession à une nouvelle bourgeoisie, parfois teintée d’exotisme. Bobos et hipsters ne sont pas nés d’hier, la gentrification des quartiers populaires des bohèmes artistiques non plus.

Le lecteur découvre au fil des pages une foule d’artistes et de penseurs, parmi lesquels nombre de juifs, noirs, homosexuels, communistes, autant de femmes et hommes à qui la société traditionnelle et conservatrice imposait silence, soumission voire persécution et qui ont révolutionné les arts et marqué profondément l’histoire culturelle américaine.
Par petites touches, le livre montre comment les prétendues “sous-cultures” font la grande histoire des arts et de la pensée et contribuent bien au-delà à faire bouger les rapports au monde.

On y croise de grandes figures telles que Walt Whitman, Oscar Wilde, Woody Guthrie, Henry Miller ou encore Marcel Duchamp. J’ai découvert le poète Claude McKay au-travers d’un subtil mélange d’éléments biographiques et de poèmes puissants. Gertrude Stein, Sylvia Beach et les salons de Paris. Un foisonnement de pensées, de styles et de parcours, passionnant bien que succinct.

La variété des styles graphiques est très agréable même si toutes les illustrations ne se valent pas. Certaines ne font qu’accompagner le propos, d’autres le transcendent et lui donne véritablement corps.
A ce titre, certains portraits comme ceux de Joséphine Baker ou de Katherine Mary Dunham et Pearl Eileen Primus, deux danseuses noires des années 40-50 sont tout simplement somptueux.

Bohemians, bien que forcément lacunaire, offre un point de vue pertinent et synthétique sur ce que le concept d’avant-garde signifie. Une friction créatrice entre la vie des artistes, leurs milieux et leurs aspirations. C’est une histoire graphique, pointilliste, une mosaïque élégante et un vrai propos.
A mettre entre toutes les mains curieuses et amatrices de beaux livres, avant qui sait, d’aller plus loin.
Un bel ouvrage de plus dans le catalogue des Éditions Nada!

Nada Éditicouv_bohemiansons,
Traduit par Jean-Christophe Bardeaux,
237 pages,
Héloïse.

À propos Héloïse

Chroniqueuse

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