Someone dresse le portrait de Marie qui grandit, traîne, travaille, tombe amoureuse, pleure, rêve, rit, comme tant d’autres autour d’elle, à Brooklyn. Fille d’immigrés irlandais, elle vit – avec son frère aîné, Gabe, et ses parents – dans un modeste appartement, principal témoin de son quotidien, des rituels familiaux, des joies et des drames qui ont marqué sa jeunesse.
À sept ans, myope et plutôt timide, Marie observe le monde de derrière ses lunettes et est toute dévouée à son père qui le lui rend bien. Si son frère, d’un tempérament réservé et studieux, vit le nez dans les livres, elle, préfère s’imprégner de l’atmosphère ambiante du quartier. Les cris des garçons comme le commérage des filles animent les rues de Brooklyn où l’on peut, entre autres, y croiser Bill Corrigan, aveugle et arbitre intransigeant des parties de baseball disputés en bas des immeubles, la Grosse Lucy, toujours accompagnée de sa trottinette et plutôt du genre imprévisible, ou encore un Walter Harntnett aussi opportuniste qu’entreprenant malgré son handicap.
Enfant devenue jeune fille, femme active puis mariée et mère de quatre enfants, Marie est le reflet d’une génération, celle du milieu du XXe siècle, et d’une communauté, celle des immigrés Irlandais installés à New York. À travers son parcours, mille autres fourmillent.
Au second plan, Gabe est toujours présent. Marie a toujours pu compter sur lui, que ce soit petite, après un cauchemar, ou adolescente, après une rupture amoureuse. Sauf que ce grand frère brillant, stable et rassurant, dont la vocation et la foi semblaient inébranlables, se montre finalement assez énigmatique et plus fragile qu’il n’y paraît.
La vie de Marie est donc comme une journée au ciel changeant : tantôt lumineuse, tantôt assombri, mais toujours éclaircie par un rayon de soleil perçant l’opacité des nuages. Elle évolue au gré du vent qui, comme le temps, la pousse vers l’avenir, laissant les tracas de l’enfance s’estomper pour laisser place aux aléas de la vie d’adulte.
Alice McDermott nous immerge dans son quotidien grâce à une écriture souple et maîtrisée, empreinte à la fois d’humour et d’empathie. Chaque détail, chaque anecdote est comme un petit diamant brut à multiple facettes qui illumine le texte, donnant à l’existence de Marie et à celle de son entourage, une odeur, un goût, des couleurs, une saveur parfois douce-amère. Alice McDermott décrit la vie avec minutie et a l’art d’en faire tout un roman.
éd. La Table Ronde, 2015
265 pages
trad. Cécile Arnaud
Pauline