Le Territoire des Barbares – Rosa Montero
Après plusieurs années d’une vie calme et équilibrée, un coup de fil vient réveiller l’angoisse sous-jacente qui n’a jamais quitté Zarza depuis sa rédemption. Au bout du fil une voix familière lui murmure “je t’ai retrouvé” et déclenche en elle le compte à rebours d’un chronomètre invisible. Dès lors, Zarza se sent traquée et nous emmène pendant 24h à la rencontre de son passé où se côtoient violence, sexe et drogue. Elle replonge dans les méandres de ses souvenirs d’enfance, les tourments de son adolescence et remet les pieds sur des territoires hostiles pour faire remonter la vérité à la surface. Au fil de ses rencontres, on reconstruit peu à peu le puzzle d’un univers familial chaotique, entre un père sadique, une mère dépressive et l’étrange relation qu’elle entretient avec son frère jumeau.
Rosa Montero à l’art de créer des personnages troublants et des univers saisissant. Sur fond de thriller psychologique, l’atmosphère de ce roman est tel, que le surnaturel s’immisce dans une réalité urbaine sombre et prégnante.
éd. Métailié – 228 pages – traduction de l’espagnol par André Gabastou
Le lecteur de cadavres – Antonio Garrido
Que vous soyez amateur de roman policier et historique ou pas, Le lecteur de cadavre se dévore sans indigestion, aucune. Les arguments ? Une intrigue maintenue jusqu’au bout, des revirements de situation, des meurtres, des trahisons, un portrait documenté de la Chine à l’époque médiévale et une variété de personnages intéressants qui rythme l’histoire sans fausse note…
L’histoire est celle de Cí. Obligé de fuir son village natal, il décide de rejoindre la capitale de l’empire, Lin’an, où il espère pouvoir réintégrer l’université et de nouveau assister le juge Feng dans son travail : faire parler les cadavres. Mais rien ni personne ne lui facilitera la tâche. Il ne devra compter que sur ses connaissances, son culot et ses atouts cachés.
Un bon bouquin basé sur un personnage réel, Song Cí, dont les techniques et le talent ont permis d’élucider bon nombre d’affaires judiciaires. Précurseur en matière de médecine légale, il a introduit de la science là où d’autres appliquaient croyances et sorcellerie.
éd. Le Livre de Poche, 2015 – 761 pages – traduit de l’espagnol par Nelly et Alex Lhermillier
Yeruldelgger – Ian Manook
Ian Manook rentre dans le vif du sujet dès les premières pages avec des crimes macabres et un commissaire borderline. À vrai dire, depuis la mort de sa fille, Yeruldelgger n’est plus seulement un bon flic, c’est un aussi un fou furieux que rien n’arrête quand il s’agit d’obtenir des informations. Et il est bien décidé à mener de front les deux affaires qui viennent de lui tomber dessus.
Au-delà des deux enquêtes qui divergent, se heurtent ou en rouvrent d’autres, on découvre les multiples visages de la Mongolie. Entre les rites et les yourtes, les terres sauvages et les quartiers pauvres de la ville, la population nomade, les riches investisseurs étrangers, les nationalistes, les âmes perdues et les corps meurtris, c’est le portrait de tout un pays que nous fait Ian Manook.
On est à la fois pris par l’enchaînement des évènements liés à l’enquête (courses poursuites, règlements de compte…) et l’univers spirituel prégnant qui donne une consistance supplémentaire au roman. C’est un polar aux rouages bien huilé où les “méchants” sont détestables et les “gentils” attachants quelque soit leur camps, il faut bien l’avouer. Mais cela n’enlève rien à l’intrigue ni aux formidables sauts d’humeurs de Yeruldelgger qui sait se montrer aussi persuasive que dissuasive selon la situation. D’ailleurs, avec l’aide de Solongo, d’Oyun, d’un gamin aussi astucieux qu’insolent et de mystérieux chamanes le commissaire arrivera peut-être à ses fins… peut-être.
éd. Le Livre de Poche,2015 – 630 pages
Les visages – Jesse Kellerman
Ethan Muller est galeriste à New York. Il n’est ni flic ni détective, alors, quand les œuvres d’un inconnu sont retrouvées dans le capharnaüm d’un appartement qui sent la misère à plein nez, il ne s’embarrasse pas longtemps pour tenter d’en retrouver l’auteur. Ces dessins, complexes et foisonnants de détails, forment une gigantesque fresque représentant la vision du monde d’une âme torturée. Le mystère et le talent qui s’en dégage suscitent une attraction inexplicable sur Ethan et conquis bien d’autres amateurs d’art en tout genre. Mais pour d’autre l’intérêt n’est pas artistique…
Lee McGrath, ancien policier, semble avoir reconnu des visages qui ne lui sont pas inconnus : ce sont ceux d’enfants disparus et dont le meurtrier n’a jamais été arrêté… L’enquête peut commencer mais, menée par un retraité malade et un galeriste peu enclin à découvrir la vérité, les investigations apportent plus de questions que de solutions.
En parallèle, Jesse Kellerman retrace l’histoire familiale des Muller et nous plonge dans un passé lourd de faux-semblant, dicté par les conventions et la richesse…un passé qu’Ethan semble totalement ignorer.
éd. Points – 475 pages – traduit de l’anglais par Julie Sibony
Pauline