Fort du succès de son premier, un souvenir nommé empire, Arkady Martine ne tarda pas à sortir une suite. Une désolation nommée paix, ayant pour but de continuer, compléter et répondre à tout ce qui fut laissé en suspend.
Prenant place trois mois après les événements du précédent livre, nous retrouvons l’empire Teixcalaan se remettant des événements du premier épisode. Mais la guerre menace déjà alors que des aliens se massent aux limites de l’empire et déciment les humains. Trois Posidoni et Mahit Dzmare, embassadrice de Lsel, sont envoyé au front pour servir de linguiste et tenter d’entrer en contact avec les aliens.
Bien que suite directe, la duologie pouvant presque se définir comme un seul roman, nous découvrons une légère rupture de genre. Ainsi, fini le “planète opéra” et place au space-opera et à la thématique du premier contact. Ce changement subtil, permet de faire écho avec le premier roman en renouvelant la carte du choc des cultures là où nous découvrions Teixcalaan à travers les yeux de Mahit, ici nous confrontons l’humanité à une autre espèce douée d’intelligence, d’ambitions et maîtrisant des technologies plus poussées que les nôtres, ayant un dialogue et une culture différente.
Mais paradoxalement, jamais un space-opera, n’aura paru si peu spacieux. Il y a un implicite fort durant tout le roman, une sensation de cloisonnement, de lieux repliés, enfermés, des couchettes, de tunnels, de pièces secrètes, tout ce joue à l’abri. Cette dualité space-opera/quasi huis clos pour une bonne partie du roman, donne une sensation de vertige assez forte lors du premier contact. Tout est cryptique et étriqué là où tout devrait être grandiose.
Et c’est là où l’on reconnaît le propos et l’intelligence d’Arkady Martine, en replaçant systématiquement l’individu au centre de l’échiquier comme moteur d’une narration. Chaque personnage on un but, s’y tienne et vont au bout, ce qui crée la dynamique d’ensemble. De voir cette entropie fonctionner à l’échelle humaine devient fascinant.
Bien entendu, les complots sont toujours de mise, le pouvoir questionné, ” l’autre, comprendre l’étranger, le barbare, l’extraterrestre, etc… Jugé, critiqué, craint et en même temps avec une volonté de le soumettre. On retrouve totalement les thématiques abordées par l’autrice, s’essayant même à pousser un peu plus le curseur de la linguistique.
Une désolation nommée paix, est la réponse à la promesse fait avec le premier tome. Une suite à la hauteur des ambitions. Reprenant le parcours des protagonistes, développant les enjeux et l’univers, Arkady Martine signe une suite aussi prenante que le premier volet et la duologie laisse entrevoir une série, si d’autres suites seront écrites, d’une grandeur immense. À lire absolument !
Éditions J’ai Lu,
Collection Nouveaux Millénaires,
Trad. Gilles Goulet,
608 pages,
Ted.