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MARCO LODOLI
MARCO LODOLI

Marco Lodoli – Si peu

Rentrée littéraire : Et jamais leurs yeux ne se rencontrèrent…

«Et moi j’ai toujours été au même endroit, immobile, racine piquée dans une dévotion».

A quoi tient la grandeur d’un amour ? A quoi tient l’intensité d’un roman ? Si peu paru lors de la rentrée littéraire ramène à nos consciences ces deux questions, liant ainsi un sujet millénaire à la singularité d’une forme.

Écrit à la première personne, le texte a des allures de confession. L’héroïne est une anti-héroïne, non au sens moral du terme mais en la constance qu’elle porte à se maintenir dans le minimum, l’infime, le peu. C’est l’histoire d’un amour qui n’est pas vécu, physiquement vécu, car jamais déclaré et qui demeure en cela en creux, figé dans le plein, se mouvant indéfiniment dans l’imagination de celle qui si intensément l’habite. C’est ainsi que gardienne d’école bornée dans sa fonction, la narratrice de cet étonnant roman rencontre un jeune enseignant de Lettres récemment nommé, qu’elle va aimer, d’un amour sans heurts ni sursauts. L’espace et le temps deviennent autres, se réorganisant dans la nécessité absolue d’être là pour cet être sur lequel elle veillera, à chaque pas, sans jamais ne rien dire, sans jamais ne rien montrer.

En faisant ici le récit d’un amour unilatéral qu’il tire à son extrême, Marco Lodoli interroge le sens d’une rencontre et de ce qui emplit une vie, non en intensité mais en durée, non en réalité mais à travers la question de l’imagination. Jusqu’où les frontières d’un amour et d’une œuvre littéraire portent-elles ? Le temps de la lecture, avant que ne se ferme l’œuvre qu’est le texte littéraire, l’invisible devient immensité et il y a une forme de génie formel à savoir tenir ainsi le fil narratif du si peu en totalité.

En exergue, la citation de Pétrarque, extraite de son Canzonière donne le ton, instaurant dans le temps une sorte de filiation élégiaque autour de l’image de l’être aimée, figure idéalisée car jamais totalement confrontée : « …de ce beau visage que de distance me sépare toujours si proche et si lointain ».

Déroutant, irritant, d’une tendresse inhabituelle, Si peu de Marco Lodoli pourrait être Flaubertien; c’est un texte qui dit tout avec rien et qui fait de sa simplicité trompeuse rédemption par la fiction en sondant les mystères d’un sentiment, universel et absolu.

Si peu, Marco Lodoli

Si peu

Marco Lodoli

POL – 5/09/2024

144p

Emilie

 

 

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