Plus que la couverture ou la 4ème de couverture, c’est le titre qui m’attire dans un bouquin. Intrigant, étrange, mystique… Allez savoir à quoi ça tient. La sonorité de deux lettres entre elles, une alliance de mots qui lance les rouages rouillés de ma cervelle ramollie, ou juste un mot, Quinzinzinzili. Autant dire que cette légèreté de jugement aurait pu me priver de bien des plaisirs. Gagner la guerre ? J’aime pas les romans sur la guerre. La tache ? Tu aurais pu te fouler un peu quand même… L’objet du scandale ? …
Heureusement, des fois, ça marche.
J’aime beaucoup ce titre, Smilla et l’amour de la neige. Ça a l’air simple, presque bateau mais ça marche. C’est précis et mystérieux en même temps : on sait que l’on va suivre Smilla, et qu’à priori il ne va pas faire chaud. On sent que cet amour va avoir une place importante, mais sans réussir à déterminer pourquoi. On se demande quel est cet amour entre Smilla et la neige, quel sera son rôle, quel est son origine. On se doute que ce ne sera pas beau, que cette neige, que l’on va nous décliner sous toute ses formes, va être salie.
J’imagine bien sûr une Smilla reine des neiges, avec l’éclat de miroir dans l’œil et dans le cœur. Fractale.
Si l’on s’étend au-delà du titre (oui je triche, mais à peine), on remarquera le Ø dans le nom de l’auteur. Danois. Copenhague. Neige. Gris. Froid. Groenland. Glace. Bateau. Océan… On peut aller loin comme ça.
Ce qui est beau c’est que finalement, lorsque l’on entame la lecture, on ne sait rien mais on est prêt à tout. Et avec Smilla, on va loin. Depuis les traces laissés par Esajas sur le toit d’un immeuble de Copenhague jusqu’aux immensités miroitantes de Gela Alta au milieu de la mer de Brume, la jeune femme nous emmène, peau de phoque sous les skis, sur la piste du meurtrier du jeune Groenlandais. Car il n’est pas tombé, c’est la neige qui le dit.
Conditions de vie et d’intégration des Groenlandais au Danemark, puissance des compagnies minières qui veulent jouer à Dieu, Smilla nous montrera tout, et se révèlera peut-être elle-même. Car en suivant la piste du meurtre d’Esajas elle va croiser sa propre histoire, ses souvenirs de jeune fille née au Groenland de mère inuit et de père danois, brutalement arrachée à son glacier et catapultée au Danemark à la mort de sa mère. Elle va devoir faire face, et, tout doucement, s’ouvrir aux autres et au monde, qu’elle rejetait depuis son arrivée à Copenhague.
Ne vous y trompez pas, ça a l’air simple, presque bateau, Smilla et l’amour de la neige. Mais comme le flocon de neige, tout est beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît, et ça ne vous laissera pas de hiku! (ou de hikuaq, de puktaaq, ivuniq ou encore maniilaq ou apuhiniq. De glace quoi.)
520 pages
Points
Marcelline
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