David Simon – Easy Money, éditions Inculte
Easy Money de David Simon est en quelque sorte la matrice de la série “The Wire”. Une succession d’articles traçants le portrait d’un homme, Melvin Williams, qui parti de rien a su bâtir un empire de la drogue à Baltimore. Pendant trois ans, le jeune David Simon va rencontrer « Little Melvin » en prison pour l’interviewer et tracer un portrait de ce personnage hors norme et de son organisation criminelle.
Mais Melvin Williams est à l’opposé du criminel cliché. Un homme, qui au quotidien s’est forgé une image exemplaire. Une vie de famille épanouie, une jolie maison, une entente parfaite avec ses voisins, une dévotion envers son entourage dans le besoin, un homme d’affaire redoutable. D’une grande intelligence, il aura su se préserver, à quelques exceptions près, se préserver du sale boulot et n’a même jamais eu de drogue en sa possession direct.
Le portrait proposé par David Simon s’intéresse autant à « Little Melvin » qu’aux enquêtes le concernant. Un texte tentaculaire, qui en 120 pages, fait le tour d’horizon de toute l’organisation criminelle, des agents impliqués dans l’enquête, des divers procès et des coups montés par certains agents pour coincer Melvin. Un document exceptionnel, un auteur décidément très talentueux !
Jessica Anthony – Le convalescent, Le cherche midi éditions, Lot49
Rovar n’est pas un virginien ordinaire, dernier descendant de la plus misérable lignée de caste hongroise les « Pfliegman », cette personne de petite taille vit dans un bus le long d’un fleuve au nom imprononçable. Il vit de la vente de viandes et passe ses journées entre nourrir une blatte géante coincée dans une conserve, lire des livres trouvés ça et là et regarder une brindille, par son hublot, danser dans le vent. Une vie morne qui va prendre un tournant inédit le jour où le Dr Monica, pédiatre de profession, va s’intéresser à lui et décider de le prendre sous son aile.
Premier roman pour Jessica Anthony, et encore un joli coup de publication pour la prestigieuse collection Lot49. Un roman lorgnant du côté de la métafiction, une relecture de l’histoire de la Hongrie et un personnage, muet, mais d’une profondeur rare, complexe et attachant et ce malgré son apparence repoussante. Quelque part entre l’univers de Kafka et un manuel d’histoire se trouve « Le convalescent ». Une auteure à suivre de très prêt.
Ted Conover – Au fil du rail, aux éditions du Sous Sol
Un jeune anthropologue choisi de partir à l’aventure et de vivre la vie de Hobos pour son mémoire de fin d’étude. Les hobos sont en majorité des « Trimeurs », des clandestins du rail qui vont de ville en ville afin de faire de petits boulots pour pouvoir subsister, mais ne sont aucunement des clochards. Ted Conover durant tout son périple va rencontrer un univers à part, un monde caché, avec ses codes de conduite et ces lieux de références. Un voyage qui va transformer le jeune Ted, qui n’en était pas à sa première aventure à ce moment là.
Ne vous attendez pas à avoir de longues descriptions sur la beauté du paysage, la nostalgie du passé ou encore les révélations métaphysiques que peuvent procurer ce genre d’aventure. Au fil du rail est un superbe carnet de voyage qui s’intéresse avant tout au mode de vie Hobos, à sa culture et surtout aux rapports sociaux qui sont propre à ce monde. Richement documenté et se lisant quasiment d’une traite son essai, d’une écriture volontairement simple, plonge le lecteur dans un univers dense à la fois riche et percutant où le danger n’est jamais loin. Que ce soit les « Bulldogs » policier du rail ou encore les autres Hobos, la liberté n’a jamais été aussi tentante et dangereuse.
Glenn Taylor – Pendaison à Cinder Bottom, Grasset
L’histoire d’Abe Baach et de Goldie Toothman, mais également l’histoire d’une partie de poker légendaire, d’une communauté et de la Virginie occidentale à l’époque du crépuscule du Far West. Une histoire pleine de magouille, de duels à l’ancienne et d’amour.
Troisième roman de Glenne taylor, après « La ballade de gueule-tranchée » et « un homme loyal », tous deux paru chez Grasset. « Pendaison à Cinder Bottom » est un bon roman d’aventure, un page turner efficace, mais décevant pour les lecteurs des précédents romans de l’auteur. Toute la profondeur que l’on trouvait dans « La ballade de gueule tranchée », où la sensation de vivre une aventure incroyable (pour Un homme loyal) sont ici passées à la trappe. Le texte favorise les séquences quasi cinématographiques et certains personnages sont même totalement stéréotypés. Un roman en dent de scie qui aurait pu offrir tellement plus.
Ted