Le nouveau roman de Constance Chlore, paru le 19 juin 2020 au Nouvel Attila, est l’un de ces ovnis qui se glissent dans les piles à lire et qui dynamitent le train-train des lectures habituelles. L’autrice prouve que la littérature est bel et bien un art vivant. Avec son écriture, elle tisse une histoire sur la violence des rapports humains. Alpha Bêta Sarah palpite dans nos mains. Son cadre est composé d’un ensemble d’éléments végétaux et minéraux.
Dans l’histoire que nous raconte Constance Chlore, tout tourne autour de la violence du père. Sa femme Maud le fuit pour trouver sa liberté ailleurs. Ses enfants, Sarah et Ernst, se réfugient dans un amour incestueux. Au début de l’histoire, Sarah fugue dans la forêt puis au fond d’une mine. L’amour entre les deux enfants ne se défait pas. Au contraire, ces êtres semblent aimantés par un désir protecteur. La pulsion de liberté d’Ernst est de vouloir apprendre à voler comme un oiseau. Chaque personnage se forge malgré le pouvoir tyrannique du père.
On aborde l’univers d’Alpha Bêta Sarah par touches successives. Les lieux sont multiples : la maison, le bar du village, la forêt et la mine où tous les hommes du village travaillent. Ces endroits sont autant de couleurs qui composent le roman. Ce qui différencie ce livre d’une littérature classique est l’écriture virevoltante de Constance Chlore. Elle n’imite pas la vie mais elle s’en empare pour faire pulser son texte. Par exemple, elle écrit des onomatopées pour mieux faire entendre le son de la fiction.
Ce conte cruel démontre l’abrutissante bêtise de la violence, celle du père comme celle des ragots des villageois. Alpha Bêta Sarah en devient un manifeste pour une résistance. La figure du père n’est là que pour être déboulonnée et déconstruite par les sursauts de vie de Sarah, Ernst et Maud. L’écho d’un tel livre doit se répandre car la violence décrite dans ce livre n’est pas fictive. Elle vient de notre monde patriarcal et nous devons la déconstruire.
209p
Adrien