Véritable institution aux Etats-Unis, le format « nouvelle » est un genre à part entière avec ses codes, ses auteurs cultes et surtout une reconnaissance indéniable. En France, hélas la considération est moindre. Bien que certains auteurs aient une réputation plutôt honnête – Bukowski, Carver, Lovecrat, Poe- la nouvelle n’en reste pas moins un style mésestimé dans l’hexagone, et c’est un tort, surtout quand on aborde un auteur de cette trempe-là.
Avec ce premier recueil David James Poissant s’impose d’emblée comme un auteur à suivre. Un auteur qui peut prétendre à rivaliser avec certains grands noms de la nouvelle américaine. On pense tous à Raymond Carver, mais tout le long de la lecture de ce « Paradis Des Animaux », je n’ai pu m’empêcher de le comparer avec un autre grand nom, moins connu chez nous, Thom Jones. Ces deux auteurs boxent dans la même catégorie, une plume fine, une analyse pertinente des personnages, un sens du dialogue et surtout une parfaite gestion du rythme sur un format court. A travers ces 12 nouvelles (13 si l’on compte les deux parties de La géométrie du désespoir), David James Poissant démontre avec beaucoup de talent une puissance narrative et une originalité mélangées à la fougue d’un jeune premier. C’est beau et les histoires sont concises et efficaces.
Des personnages souvent en rupture, mais une rupture moins prononcée que chez Russell Banks par exemple, dans un monde dans lequel ils vivent et qui souvent se retrouvent dépassés par un évènement, d’un premier abord sans importance ou qui fait partie du cycle de la vie. Puis petit à petit cet évènement va progressivement transformer le protagoniste, la perception que le lecteur a du personnage aussi va changer au court de ses nombreuses histoires.
Puis il y a cette nouvelle « Amputée », c’est la deuxième, mais c’est celle qui risque de vous convaincre en quelques pages. Cette rencontre anodine au milieu de la nuit, entre un homme divorcé et une jeune femme de 17 ans, cet échange qui va se produire entre eux, ce jeu de vérité et de mensonge, cet échange de deux personnes fêlées mais qui essayent encore d’avancer, un Chef d’Oeuvre ! Une autre pleine de légèreté à propos du rêve d’un loup, une nouvelle qui fait sourire mais ne manque pas de profondeur, enfin je ne vais pas tout dévoiler non plus.
Un recueil qui fait du bien, un recueil surtout qui encore une fois, démontre que le genre « nouvelle » est un style à part entière qui a ses codes et apporte quelque chose qu’aucun roman n’est capable de fournir aux lecteurs. David James Poissant avec « Le paradis des animaux » fait une entrée fracassante dans le genre et tout comme Thom Jones ou Raymond Carver, espérons-le nous fera découvrir d’autres recueils de la même trempe !
Albin Michel
Terres d’Amérique
Trad. Michel Lederer
340 pages
Ted.
Excellent,vraiment, et un chic type.
Normalement je n’aime pas les nouvelles mais je sens que je vais faire une petite exception 🙂
Pareil que Léa !