“Les taches de sang, les traces de larmes, les lettres mortes et les sentences de mort”
Douze chandelles, comme douze âmes, comme douze fins de vie, comme douze victimes. De ce terrible 26 janvier 1948 où un homme se présente dans une banque impériale, dit être médecin envoyé par le ministère de la santé pour procéder à un vaccin du personnel à cause d’un cas de dysenterie signalé dans le quartier.
Deux flacons sont mélangés, seize employés de la banque en boivent le contenu et douze en meurent.
“Dans la ville occupée, vous êtes écrivain et vous courez”
Un écrivain veut faire un livre de ce fait divers. Il convoque les voix des douze victimes à travers des carnets, lettres, etc. Convoquer pour faire éclater la vérité, mais la vérité est cruelle et violente.
“Nous sommes ici à cause de vous, chuchotent-ils ? A cause de vous, cher et charmant écrivain chéri, à cause de vous”
Un Anglais qui écrit sur le Japon et Tokyo en particulier, surtout un Anglais roi du roman noir ultra anxiogène et glauque dans son pays ne peut que montrer une facette peu reluisante d’un pays quelque soit le pays où il pose sa machine à écrire.
David Peace grand habitué des faits divers comme matière première dans ses romans avait déjà transcendé le genre du roman noir avec sa “tétralogie du yorkshire”. Mais David Peace n’a pas chassé tous ses démons, Il en a encore un bon tas qui rôde et qui ne demande qu’à sortir à travers sa plume.
“Tokyo ville occupée” est encore un incroyable tour de force. La structure est fascinante cette alternance entre l’histoire du journaliste et les 12 témoignages est majestueusement bien gérée. Les changements de styles sont d’une maîtrise incroyable, cette alternance d’un témoignage à l’autre sans perdre le lecteur, ni casser le rythme rend ce livre hypnotique voire névrotique ; le lecteur se retrouve vite pris dans la folie du journaliste et les angoisses des âmes errantes.
´ “Vous êtes aveugles à nos souffrances. Nous sommes si fatigués, si effroyablement fatigués. Vous êtes sourds à nos supplications. Nous pleurons sans verser une larme, nous crions sans émettre un son”
“Pourtant nous attendons toujours, et toujours”
“Nous observons”
Décidément il y a bel et bien quelque chose de pourri au royaume du soleil levant !
354 pages
Payot Rivages
Ted
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