Car une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, voilà que les éditions le Berbolgru agrandissent leur famille en la présence de Slapinbag d’Emilie Gleason, nouvel opus de la collection Flalfa, et de la bande-dessinée alambiquée Le bruit de l’ordure de Valfret.
Deux nouveaux rejetons infernaux prennent place dans les rangs des fanzines indépendants, porteurs d’absurdités tortueuses aux traits bruts, cette ligne éditoriale si particulière qui est propre au Berbolgru.
Emilie Gleason livre un condensé de ses rêves hallucinés dans Slapinbag et son journal de rêves. Dans ce dernier elle explique la technique qu’elle emploie pour se rappeler de ses songes nocturne, à savoir se réveiller immanquablement à 5h du matin, heure où le cerveau carbure en roue libre sur le sentier de l’imagination sans tabou et sans garde-fou.
En découle un journal de bord plus intime où chaque nuit est densément représentée en que seule illustration ou sous la forme de vignettes muettes: homme, femme, animaux et monstres se rencontrent et se mélangent pour un résultat hanté, cru et cynique à souhait.
Même si ce ne sont pas nos propres fantasmagories, le non-sens absolu schématisé par Emilie Gleason fait follement écho à nos pensées nocturnes biscornues. C’est toutes les angoisses profondes, les fantasmes charbonneux et l’impact de la société sur notre inconscient qui est vomi ici, sans artifice.
Emilie Gleason ose et endosse ses rêves bizarres, tordus, parfois malsains ou même carrément cracras et les dessine d’un coup de crayon spontané évoquant celui de Mirion Malle (Commando Culotte) ou encore Chario Spirale. Loin du dessin académique planplan, celui de l’auteure s’apprête à merveille au sujet qu’elle aborde, à savoir les méandres que l’on garde en sois sans jamais vraiment les assumer.
L’artiste touche-à-tout Valfret s’arme quand à lui d’encre de chine épaisse et de correcteur blanc pour Le bruit de l’ordure, une bande-dessinée goudronneuse où les sons se meuvent et prennent corps, des corps lourds et pesants, des corps de déchet.
Connu pour sa carrière aussi prolifique que marquée par une liberté et une richesse picturale, Valfret capture les onomatopées gargouillantes et viscérales de mouvements que l’on ne sait si ils appartiennent à un être réel ou imaginaire, si la pensée organique qu’il étale à travers cette série d’images bichromiques est issue du vivant ou bien de l’inanimé sensible.
C’est une BD qui enferme un capharnaüm gueulant dans un écrin de silence. Les empâtements et les courbes du dessinateur forment des corps pour mieux les détruire par la suite, apportant une dynamique sinusoïdale dérangeante et belle, un uppercut à la fois étrangement barbare et mélodique.
On y ressent la capacité homochromique de Valfret qui lui confère une mouvance graphique et narrative sans limite qui, cette fois, semble retranscrire le bruit du monde actuel, des sociétés humaines contemporaines, du consumérisme croissant et tentaculaire, bref, le bruit de l’ordure.
Editions le Berbolgru
Collection Flafla & Hors Collection
44 & 20 pages
Caroline