Décidément Fred Uhlman grimpe toujours plus haut dans mon estime.
À chaque livre, même si ils sont peu nombreux, sa plume s’affine et son style, si particulier, emprunt d’un réalisme ahurissant, saisi le lecteur, au cœur. Directement au cœur.
Une vie faite de sacrifices, de choix, pris aux mauvais moments, aux mauvais endroits, qui vaudront à Conrad Von Hohenfels la peine de mort pour avoir participé au complot contre Hitler, en 1944.
Pourtant partisan fanatique dès sa prime jeunesse, malgré les avertissements de son meilleur ami juif, Hans, Conrad jette son dévolu sur la dictature du Führer, la bouche en cœur et les idéaux copiés aux siens. Un parfait petit soldat, fier, écervelé et absolument influençable.
Jusqu’au jour où ce petit guerrier semble prendre conscience de la cruauté de son idole, poussant le culte de la barbarie toujours plus loin, plus fort, au grand désespoir d’une communauté lapidée.
Une communauté qui abrite en son sein Hans, ayant fuit des années auparavant l’Allemagne nazie en laissant derrière lui son ami Conrad.
Alors, avec l’influence des Alliés, la déroute de l’Allemagne et les attentats contre Adolf Hitler, Conrad prend conscience, petit à petit, de la réalité qui l’entoure. Ce brouillard de haine et de terreur qui aveuglait ses sens. Condamné à mort pour trahison il décide d’écrire une ultime lettre à son ami d’enfance, Hans, qu’il n’a pas vu depuis des années, tentant en vain d’expliquer ses choix et ses erreurs passées. Une ultime lettre de pardon, pour soi, pour sa dignité mais aussi pour retrouver, avant de mourir, les liens si fort qui l’unissaient à son ami.
« Faible et confus, je l’ai certainement été. Malhonnête, jamais. Pardonne-moi, mon cher vieil ami – si tu le peux. J’ai passé avec toi les plus mois de ma vie. Mon amour pour la poésie, pour l’étude, c’est à toi que je les dois. Je dois m’arrêter maintenant…
La mort m’appelle. »
Dans ce bouleversant récit, Fred Uhlamn y distille l’émotion la plus palpable qu’il m’ait été donné de rencontrer. Une prose si simple et pourtant si efficace, une plume légère et enlevée qui dénote avec la barbarie ambiante. « La lettre de Conrad » est un culte à la poésie, à l’amour et au pardon.
L’auteur a réussi le pari de faire vivre ses personnages, à travers leurs choix, leurs idéaux mais aussi leur sensibilité.
Malgré ce récit poignant et foncièrement triste l’auteur parvient tout de même à nous prouver que l’amitié n’est pas qu’éphémère.