Avec Tout est normal, Guillaume Condello incline la poésie face au quotidien et sa réalité parfois triste et alarmante. Comment l’écriture poétique peut traverser les enjeux du réel, du plus intime des événements individuels au drame vécu par l’ensemble d’une société ? Guillaume Condello ne donne évidemment pas la réponse, mais en dix chants et quatre périphériques, il approche la réalité par le prisme d’un lyrisme retenu.
Le poète écrit en ayant en tête la musicalité de sa phrase. Ses chants ne s’abandonnent dans aucune convention, le ton se tient en équilibre pour décrire par exemple l’horreur des attentats de Nice, la musique de Nirvana ou les élections présidentielles. La tempérance de la poésie de Guillaume Condello permet de ne pas altérer la réalité évoquée par un point de vue envahissant.
Pourtant, dans Tout est normal, le point de vue du poète est primordial. Il permet de saisir l’effort proposé par Guillaume Condello. Il n’est pas question de se demander l’intérêt de la poésie par rapport à la réalité. Elle s’établit incontestablement pour apporter un autre regard sur des éléments aussi triviaux que la musique du générique de Téléchat en s’intercalant parfois dans une conversation.
Guillaume Condello ne déroge pas à sa position de poète, il aborde le monde avec son seul point de vue d’être humain écrivant de la poésie. Ce que l’on peut en retirer est justement cette proposition du titre : Tout est normal. La poésie incite à prendre du recul. Le travail de Guillaume Condello peut décrire un quotidien, nous y verrons toujours son abstraction.
Tout est normal propose ainsi de replacer la poésie par rapport au vécu, d’interroger sa place. Au cœur du recueil, le poète pose la question si nous devons avoir honte de la poésie ? La place que l’on accorde à cet art littéraire est parfois démesurément grande pour être au final ridiculement dérisoire. Certain-e aime parfois dire qu’elle est indispensable, comme l’air que l’on respire. On oublie alors que la poésie n’est pas un air ambiant mais un outil de perception et de transmission.
Guillaume Condello en écrivant poétiquement la réalité instille des questionnements sur sa pratique. Sous le vers du poème, nous pouvons voir aisément que sa normalité (ou plutôt sa norme) est largement contestable.
152p
Adrien