Jason Shiga continue de nous en mettre plein les mirettes et de nous retourner le cerveau dans ce deuxième et très attendu opus de Demon. Poursuivant la pérégrination sanglante de son personnage principal Jimmy Yee, mathématicien et père de famille qui s’est rendu compte qu’il était capable de prendre possession de l’enveloppe charnelle de la personne la plus proche de lui, à la manière d’un parasite pilotant un corps-vaisseau.
Le seul problème c’est que pour passer d’une dépouille à une autre, ce bon vieux Jimmy doit se suicider, ce qui entraine pas mal de machabés et attire très vite l’attention des experts du gouvernement qui apparement, en savent bien plus que ce qu’ils ne laissent paraitre.
Leur but: embaucher Jimmy, dont le don pourrait servir à des fins de paix mondiale entre autre… Mais le personnage de Jason Shiga a d’autres chats a fouetter, notamment celui d’atteindre l’objectif qu’il s’était fixé avant tout ce bazar; venger sa fille et sa femme décédées lors d’un accident de voitures causé par un alcoolique qui s’en tire un peu trop bien à son goût.
Dans ce deuxième volet de Demon, Jason Shiga continue sur sa lancé totalement dingue: à travers un style cartoonesque où les personnages ressemblent à des jouets pour enfant, il introduit une narration extrêmement cartésienne et pointue. Le déroulement du scénario est juste fou: tous les engrenages s’assemblent et forment une bande-dessinée comme aucune autre…
On y retrouve un Jimmy qui délaisse de plus en plus sa part d’humanité pour arriver à ses fins. Il teste, note, calcule tout de manière de plus en plus rapide et détachée, révélant un QI dépassant de loin celui d’une huitre. Il est obnubilé par la raison de ces réincarnations et poursuit toujours plus sa fuite en avant. Cependant, un élément majeur va chambarder ses plans de revanche: sa fille est toujours vivante, sauvée par ce don étrange que lui-même possède.
Bientôt, aidé par des expériences commandées par les experts gouvernementaux, Jimmy se rend compte que tout ceci est génétique. D’après eux, cette “transmutation” se fait grâce un organe appelé le “flastique” (se trouvant dans la 4ème dimension juste au dessus du cerveau) qui, au lieu de s’atrophier suite au décès comme de coutume, parvient à se déplacer d’un corps à un autre dans le cadre de la famille Yee. Le truc, c’est qu’apparemment ils ne sont pas le seuls sur Terre a posséder ce petit plus, et que les autres démons sont moins soucieux de l’éthique et de l’humanité que notre personnage principal.
Les démons sont en liberté, possédants un esprit agile et primitif, perçant et décalé. Autant vous dire que c’est assez délicat de les stopper et de leur faire entendre raison.
Les rebondissements s’enchainent, le rythme s’accélère et l’auteur ne perd à aucun moment l’accélérateur de cette machine endiablée. Rien n’arrête Jimmy, qui parvient à se suicider de manières plus inventives et farfelues les unes que les autres, avançant de plus en plus loin dans ce dédale macabre qui lui tient lieu de quotidien.
En reprenant une thématique vieille comme le monde et en la replaçant dans un contexte moderne et réaliste, Jason Shiga fait de l’exorcisme un don qui, cumulé à une intelligence poussée, peut mener à un scénario des plus intéressant, digne des plus grands films: méthodique et irrévérencieux, sanglant et effréné, ce deuxième volume place Jason Shiga au rang des auteurs à lire absolument.
Editions Cambourakis
224 pages
Caroline