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Le Poisson – Dean Garlick

Le récit nait des yeux de Patrick, un homme très ordinaire, à la vie somme toute, vraiment ordinaire. C’est sa première croisière à bord d’un navire géant, des congés bien mérités au cœur d’une carrière professionnelle épuisante et ennuyeuse. Mais cette vie, c’était avant. Avant qu’il ne soit jeté du bateau à la mer et qu’il ne soit avalé par Le Poisson, créature fantastique et fascinante.

L’intérieur du Poisson est un véritable microcosme. Patrick est projeté dans un monde inconnu, un univers parallèle telle une seconde réalité, si ce n’est qu’elle prend forme à vingt mille lieues sous les mers. Un récit biblique qui rencontre les plus beaux mythes de la baleine croqueuse d’hommes. Et c’est toute une ville qui prend vie dans cet intérieur répugnant et chaleureux à la fois. Dans cette autre réalité, le temps ralentit sa course effrénée et il n’est pas rare de croiser quelques figures multi-centenaires. Le Poisson vous tient captif mais offre en retour l’accès à l’immortalité.

« L’eau couleur de rouille me baigne jusqu’au cou. Espérant gagner quelques minutes de sursis, j’essaie de me détendre, d’imaginer que je suis un ballon de plage, léger comme une bulle. Un nouveau moustique, les ailes qui vrombissent comme des hélices, se pose sur mon nez et examine soigneusement le terrain avant de choisir où frapper. J’accepte la douleur, sans même chercher à le chasser. Il ne reste plus qu’à présent que mon nez et mes lèvres à surnager, l’eau me recouvre les yeux. Je suis une cape qui de sous l’eau noire avale des goulées d’air. »

C’est aussi pour le héros, le temps de l’introspection, un retour sur sa vie antérieure, ses états intérieurs, sur l’envie furieuse de définir le bonheur sans pouvoir en dessiner les contours. C’est un peu le regard sur l’intime et les rêves au sein d’un monde bien plus qu’étrange. On se perd aisément dans les faux-semblants et franches vérités à travers cette fresque de personnages loufoques et uniques.

«J’essaie de me souvenir des choses que j’aime dans le monde extérieur. Une bière froide à la fin de la journée. Une flânerie apaisante en grattant mon ukulélé. Ces précieux moments où l’un de mes clients découvre enfin la voie d’une existence plus positive. Une glace à la vanille agrémentée de baies fraîchement cueillies. Les week-ends de congé, assis sur la plage, la chaleur des galets sous la plante de mes pieds. Ces heures qui sont des flots de possible qui s’écoulent. Est-ce une si mauvaise vie ? »

Les allusifs publient ici encore, une pure perle littéraire. Les mots lancent leurs images à nos cerveaux de lecteurs surpris, la prose est sublime, à la hauteur de ce récit absurde et fantasque. C’est une bouchée délicieuse qui s’ingère très facilement, et tout comme Le Poisson, on prendra bien le temps de la digestion…

Le poisson dean garlick Les Allusifs

Traduction : René-Daniel Dubois

Septembre 2015

227 pages

À propos Lucie

Chroniqueuse

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