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L’étrange Questionnaire – Éric Poindron

À la fin de l’année 2016 est paru un petit bouquin avec de drôles d’airs. Ça s’est passé chez les Venterniers, sous la plume d’Éric Poindron. L’étrange questionnaire vous propose de faire une incursion de soixante minutes et en soixante questions, dans les couloirs de votre imagination.
Une invitation à l’exploration sur banc, canapé, lit, herbe mouillée, comme vous voudrez. Une heure de visite guidée dans votre propre cabinet de curiosités.
Chaque étrange question, comme autant de portes sur nos petits trésors cachés, révèle ce qui nourrit nos imaginaires : lectures, mythologies, films, paysages et décors, voyages faits ou rêvés, rencontres improbables et petits mystères.
Cet étrange livre est comme le ticket d’entrée d’un drôle de musée que chacun aurait en lui sans oser l’imaginer.Il y a quelque de chose de véritablement altruiste et libérateur dans cette démarche. Éric Poindron offre au lecteur/joueur/rêveur un support à fantasmagories, une chambre des miroirs pour l’inventivité en soi.
La patte de l’auteur est bien présente, poétique et élégante, Éric Poindron se fait ici sphinx généreux et passeur de mots. Pour étayer, accompagner les questions, des citations, des références à des écrits étranges que l’on découvre en même temps que des bouts de soi-même. Humblement, chacun devient créateur parmi les créateurs, l’érudition de l’auteur est sans élitisme, au service du merveilleux et ce celles et ceux qui veulent bien jouer le jeu.
Le livre contient de nombreuses facéties et encouragements sincères à oser, à prendre les tangentes, les diagonales du fous qui n’ont pas été tracées ou dont nous poursuivons le voyage, dans d’invisibles échiquiers. Quel plaisir que cette sensation du créateur en soi.
Pour certains, ce sera un déferlement d’images, pour d’autres des histoires plein la tête, aux mots bouillonnants, ou des films intérieurs, des sensations au creux des tripes. Tout est possible, dans la mise en mouvement de l’esprit… «l’étrange questionnaire d’Éric Poindron…ou le livre qu’il vous faudra en partie écrire. Ou dessiner. » Voilà qui est clair.

De la première à la quatrième de couverture, tout est délectable. L’objet est très beau, son toucher même est agréable (pour les paraphiles bibliomanes avertis), chaque ligne éclaire le lecteur d’étranges lumières, comme un promeneur saisi par l’éclat du soleil dans les brouillards d’hiver.
Pendant que l’avant-propos convaincrait les plus perplexes d’entre vous, les enthousiastes découvriraient John B. Frogg, se passionneraient pour la sémantique comparée de la cryptopathobiblionomadie et de l’onirocryptopathobiblionomadie ou dégusteraient les petits textes associés au questionnaire, pour en souligner le propos, l’accompagner.

J’ai demandé aux copains d’Un dernier livre de me confier leurs mots pour l’occasion. Voici leurs réponses à la question 5 :
« Lorsque vous étiez gardien de phare, à quoi rêviez-vous les nuits de tempête ? »

« La nuit je rêvais de bonshommes d’écume qui se faisaient des batailles de boule de mer, et certains cachaient des bateaux dedans. »
« Aux fantômes errants parmi les vagues »
« Au calme des fonds »
« Je rêvais d’une lame de fond, emportant le phare, m’emportant. Et je roulais avec elle. D’une vague qui ne s’arrêterait jamais de rouler. »
« Aux cris déchirants des oiseaux marins égarés qui me poursuivent jusqu’au plus profond du sommeil. »
« À un beau marin barbu…ou a un beau marin tout court ».
« Aux chants du vent me confiant les secrets d’Océan, pour me rassurer »
« Au lent balancement des méduses dans l’eau déchainée »

Questionnaire de Proust du bizarre et du merveilleux pour soi. Faux test de personnalité, sans nombril ni cases mais avec amusement et étonnement souvent.
J’ai fait plusieurs fois ce questionnaire, par bribes, en imaginant un ami, une personne horripilante, mes enfants même. Tout est possible, tout est permis, sauf l’ennui et le vide.
Un bouquin comme un cadeau pour l’esprit. Faites-vous une fleur, offrez-vous et offrez un catalyseur à idées, pas besoin d’occasion pour ça.

Éditions les Venterniers

108 pages

Héloïse

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Chroniqueuse

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