Depuis plusieurs années, nous avons la chance de pouvoir (re)découvrir l’œuvre de Louis Zukofsky avec des nouvelles traductions françaises. Il y a notamment l’impressionnant « A », paru en 2020 aux Éditions Nous traduit par François Dominique et Serge Gavronsky. Ce livre est épais de 792 pages que Louis Zukofsky a écrites tout au long de sa vie. Mais si nous restons attentifs à comprendre l’importance du poète américain, on ne peut pas s’arrêter à ce « A ». Il faut lire les autres facettes qui composent son œuvre. La toute jeune maison d’éditions L’extrême contemporain a eu la bonne idée de faire paraître l’unique pièce de théâtre de Louis Zukofsky : Arise, Arise dans une traduction de Philippe Blanchon, l’un des grands défenseurs du poète objectiviste en France.
Cette pièce de théâtre est surprenante pour différentes raisons. Les lecteurices qui auraient lu les autres livres de Louis Zukofsky auront la surprise d’y voir une écriture tournée vers le présent et la vitalité de la scène. Comme il est indiqué, Arise, Arise peut se jouer avec des danseuses et des danseurs. La place de la musique, notamment celle de Bach y est primordiale. Louis Zukofsky développe ici une vraie expression dramaturgique où se mêle des tonalités hétéroclites, comme le tragique, l’onirique ou encore le revendicatif. Arise, Arise s’inscrit dans une croyance dans la vitalité de la scène.
Celleux qui n’aurait pas encore lu Louis Zukofsky ne ferait pas un faux départ en lisant d’abord Arise, Arise. Au contraire, cette pièce de théâtre fait partie intégrante de l’œuvre de Zukofsky. On y retrouve énormément d’échos au poète et à sa vie. Arise, Arise raconte une histoire d’amour filial qui est très proche du vécu de Louis Zukofsky. Sa sœur est morte très jeune et il a longtemps rapproché la date de décès de sa mère à sa propre date de naissance. Au-delà de ses considérations biographiques, tous les axes importants de l’écriture du poète s’y retrouvent, comme l’explique très bien Philippe Blanchon dans sa postface.
L’onirisme de la pièce peut paraître au premier abord un peu daté. C’est vrai que l’esthétique théâtrale qui prédomine actuellement est loin du symbolisme qu’use Louis Zukofsky dans Arise, Arise. Mais il faut se laisser porter par cette écriture à la fois riche en écho littéraire qu’en tension dramaturgique. Nous lisons ici une véritable histoire de rêve, celui sans doute d’une époque révolue où les idéologies régissaient les vies personnelles. Il ne faut voir dans Arise, Arise que cette documentation d’un geste vivant, où les dialogues et les didascalies démontrent d’une vraie passion théâtrale.
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Philippe Blanchon
132p
Adrien