Seconde publication dans la collection « Les Hallucinés » aux éditions du Typhon. Cette collection proposant des romans dans le genre de la littérature gothique, et après l’excellent « Eltonsbrody » d’Edgar Mittelholzer, c’est au tour du premier roman de Lucie Baratte de faire parler de lui.
« Il était une fois, une fois plus vieille, une fois plus sombre, dans un pays forcément très loin d’ici, un roi si cruel qu’on le croyait descendant d’un ogre. »
Le chien noir, c’est une rencontre, une rencontre entre une jeune princesse, Eugénie, et un chien. Après avoir été mariée de force à un riche roi d’une contrée lointaine, cette dernière, sur le trajet de sa nouvelle demeure, va rencontrer un chien noir, blessé, qu’elle va décider de recueillir.
Le chien noir c’est l’histoire d’une jeune femme soumise à la volonté des hommes, des puissants, qui va de rejet en manipulation, de séquestration en violence. Son mari étant la figure archétypale du pervers narcissique.
Le chien noir c’est l’histoire d’un lieu, d’une noirceur, d’un château froid et tortueux, de voix, d’ombres, de mystères et d’une pièce fermée à clef.
Mais le chien noir c’est également l’histoire de cette princesse qui cherche à s’émanciper à s’appartenir et se construire.
« Il était une fois un conte né des profondeurs caverneuses de l’humanité. Engendré d’un mythe dévoyé à la force du songe. »
Utilisant la forme du conte et offrant une relecture de Barbe Bleue, Lucie Baratte se plie à l’exercice non sans malice et une certaine aisance. Distillant des éléments anachroniques pour noyer les pistes sur l’époque du conte et empruntant le style du roman magique d’Angela Carter, L’auteure offre ici un premier roman d’une grande cohérence.
Noir et incandescent, le tout servi par une écriture élégante, ce conte « post-moderne » au style et à l’écriture incisive et emprunt d’une grande finesse, interroge le lecteur sur la place de la femme, mais aussi sur les différences et le rôle que la femme doit avoir dans notre société. Un questionnement très à propos et tombant plutôt à point nommé avec l’actualité du moment.
Un premier roman/ conte réussi, une relecture intéressante et pertinente de Barbe Bleue, Le chien noir est un incontournable de cette rentrée littéraire. Le texte est accompagné d’une postface passionnante d’Elizabeth Lemirre, qui donne des clés de compréhension sur le genre et l’utilité du conte, ainsi qu’une analyse du texte de Lucie Baratte.
En bonus, Lucie Baratte a mis à disposition un site internet en complément de la lecture de son texte. Un site qui vient encore renforcer l’intemporalité et l’anachronisme et perdre un peu plus le lecteur dans l’univers inquiétant de l’auteure.
Les éditions du Typhon,
Collection Les Hallucinés,
188 pages,
Ted.