Paru en 1911, Zuleika Dobson, l’unique roman de Max Beerbohm est un exquis mélange d’humour anglais, de marivaudage feint et de dérision sur l’éducation aristocratique. Une farce rafraichissante, charmante sur un univers désuet, volontairement suranné et ridicule. L’édition de Toussaint Louverture est, comme à son habitude, d’une joliesse remarquable, et offre le plaisir des illustrations de George Him, qui accompagnent parfaitement l’écriture très visuelle de Beerbohm.
Zuleika Dobson, un nom bien étrange, exotique pour une britannique. Prestidigitatrice du début du XXè siècle, elle séduit plus par sa grâce irresistible, sa beauté atypique que par ses tours quelque peu médiocres. Orpheline sur le tard, Zuleika part rendre visite à son grand-père, recteur d’Oxford, sans se douter de la tragédie qui aura lieu. En jeune femme courtisée de tous, Zuleika n’a pourtant jamais été conquise, elle attend impatiemment l’homme qui saura l’ignorer. Et c’est à Oxford justement, qu’elle croit le trouver en la personne du précieux Duc de Dorset. Le lendemain de leur rencontre, Zuleika lui avoue ses sentiments, qui se voient réciproques malgré la froideur apparente du duc. Celui-ci est désormais amouraché de Zuleika, provoquant le rejet de cette dernière. Et malheureusement pour Zuleika, l’ensemble des étudiants d’Oxford éprouvent les mêmes sentiments à son égard. Bien que flattée, elle trouve cette situation ennuyeuse, et tente de retrouver le duc des premières heures, qui ne prêtait aucune attention à sa présence. Celui-ci, afin de ravir à jamais son coeur, décide de mourir pour elle, accédant ainsi à sa demande d’un amour à sens unique. Voilà alors que l’idée essaime et bientôt tout Oxford ne bruisse plus que de suicides en hommage à Zuleika.
Entre dandys, fantômes, sculptures historiques et perles changeantes, Beerbohm joue avec le lecteur, le narrateur et les personnages, surprenant tel un prestidigitateur aguerri par des tours de passe-passe de haute volée. On ne s’ennuie jamais malgré un dénouement annoncé, au contraire, on se délecte de la langue de Beerbohm et de son regard à la fois acéré et fantaisiste.
Editions Monsieur Toussaint Louverture,
352 pages,
Traduction de Philippe Néel, revue par Anne-Sylvie Homassel,
Illustrations, George Him,
Aurore.