Grâce à la traductrice Florica Courriol, les lecteurs francophones peuvent découvrir un chef-d’œuvre roumain du début 20ème. Dans La ville des acacias, Mihail Sebastian décrit avec subtilité sa vision de l’adolescence. Celle-ci est retranscrite à travers la vie d’Adriana, jeune fille issue de la bourgeoisie de D…, qui voit son corps et son tempérament changés du jour au lendemain. La description de cette période de la vie se fait ici de manière inédite. On ressent autant l’épanouissement d’une jeunesse dorée que le corset d’une société patriarcale.
Adriana va donc découvrir l’approche de la vie adulte et ses premiers émois amoureux. On rentre directement dans l’intimité de cette jeune fille. Après une première déception, Adriana tombera amoureuse de Gélou, un jeune homme également issu de la bourgeoisie de sa ville.
Les amis de ces deux amoureux forment une société éduquée, qui dégustent le temps qui passe avec douceur et mélancolie. Un jour, Adriana joue au piano un morceau de Cello Violin. Elle ne sait pas encore qu’il sera un personnage essentiel de la fin de son innocence.
L’écriture de Mihail Sebastian restitue délicatement les troubles de cet âge de la vie. L’écrivain semble accorder de l’importance à ce qui ne l’était pas au début du siècle passé. Nous sommes plus habitués à connaître de cette époque des préoccupations d’adulte, faites d’aventuriers et de penseurs très sérieux.
Malgré tout, en 1935, Mihail Sebastian offre une attention particulière à la vie d’une jeune fille. Il fait de son roman une délicate attention aux amours débutants, à ce qui nait et reste fragile. Bien qu’il n’ait pas de vue féministe, on peut tout de même y voir une description des injonctions faites aux femmes de se contenir à leurs carcans.
Au-delà du sujet, la lecture nous fait découvrir une langue savamment dosée en métaphores. Il règne une atmosphère de quiétude et de bienveillance dans La ville aux acacias. Même le tumulte des sentiments ressemble à une douce tempête.
Ce rapport à l’intime, nous le cherchons parfois dans une littérature plus actuelle. Pourtant c’est bien des vies adolescentes d’une autre époque que nous lisons. Certains aspects de la vie de l’héroïne sont datés et ne pourrait avoir lieu au 21ème siècle. Alors nous pourrions imaginer bien d’autres cheminements pour une jeune Adriana devenue contemporaine. Mais son histoire gardera toujours la délicatesse des premières fois.
Traduit du roumain par Florica Courriol
224p
Adrien
Analyse raffinée d’un roman qui ne vieillit pas, mise en perspective intéressante avec une conclusions très intelligente, comme sait si bien le faire Adrien Meignan. Bravo!