« Si vous vous préparez au pire et qu’il n’arrive jamais, vous êtes perçu comme un hurluberlu. Mais si une catastrophe que vous aviez prévue a vraiment lieu, alors votre vie a un sens. Vous n’êtes pas un simple expert. Vous êtes un prophète. »
Et si les mathématiques codaient la vie ? Et si les mathématiques pouvaient nous raconter le passé et le présent ? Et si nous pouvions anticiper l’avenir ? Et si les catastrophes à venir pouvaient être annoncées à l’avance afin de minimiser les pertes matérielles et humaines ?
Mitchell Zukor pense que les mathématiques et l’utilisation de statistiques en particulier peuvent lui permettre de prédire la prochaine grande catastrophe. Cela tombe bien « Futur World » est d’accord avec lui et décide de le débaucher de son cabinet de conseil financier. Son nouveau job : calculer les pires scénarios possibles et ce de manière la plus complète et précise possible. Le but étant de pouvoir couvrir les entreprises contre n’importe quelle catastrophe à venir. Un marché florissant qui très vite prend une ampleur colossale l’engloutissant petit à petit dans un monde de statistiques et de catastrophes. Un seul lien le retient à la réalité, une correspondance avec une ancienne amie Elsa Bruner. Mais voila, une de ses catastrophe se réalise et le Prophète Mitchell se retrouve projeté dans un de ses cauchemars avec pour seul lueur l’espoir qu’Elsa soit encore en vie.
Dans la collection Feuilleton Fiction, je veux le petit nouveau Nathaniel Rich. Cet écrivain américain est l’auteur d’un essai « San Francisco Noir: The City in Film Noir from 1940 to the Present » et d’un premier roman non traduit en France « The mayor’s tongue ». Donc nous découvrons ici grâce aux éditions du Sous-Sol son troisième livre « Paris sur l’avenir ».
Cette maison d’éditions qui nous avait déjà fait le coup de l’Outsider avec l’incroyable « Alphabet de flammes » du talentueux Ben Marcus. Et force est de constater que le coup de « prends toi ça dans les dents » est encore une fois de mise.
Comme déjà constaté pour d’autres jeunes écrivains américains, un renouveau littéraire prend forme dans le milieu des auteurs de l’oncle Sam. Un retour vers une forme narrative plus linéaire, plus structurée, mais un mélange des genres et une profondeur de réflexion beaucoup plus complexe et complète. Des romans qui gagnent en puissance et en finesse. On peut citer quelques exemples récents, outre Ben Marcus, il y Adam Novy et sa génial « cité des oiseaux » ou encore Peter Heller et sa « constellation du chien ».
Ici Nathaniel Rich empreinte aussi bien au style de Saul Bellow, à l’univers du « post-apo » qu’au « nature writing ». Un mélange des styles intelligemment découpé en trois parties distinctes dans son roman.
La finesse d’écriture et la profondeur du sujet abordé sont ultra travaillées et l’univers richement détaillé et imagé de l’auteur rend ce « Paris sur l’avenir » dense et intense. La réflexion sur notre monde, la futilité et les probabilités que tout puisse partir à vau-l’eau en une seule rafale ou une seule tempête sont pertinemment développées. La relation entre Mitchell et Elsa, aussi platonique qu’intense, fonctionnant comme un reflet de ce que l’autre n’est pas, est un des points les plus intéressants du roman.
Une belle découverte, pour un texte qui ose aussi bien s’essayer au roman d’aventure que de lorgner du côté de la quête philosophique. La traduction de Camille de Chevigny est impeccable et signalons le, car c’est de plus en plus rare, la couverture est magnifique.
Editions du Sous-Sol,
Feuilleton Fiction,
Trad. Camille de Chevigny,
350 pages,
Ted.