Cet essai est un récit de voyage et d’amour. Flânant entre les pays, sans autre attache que celles d’amitiés lumineuses et une soif intarissable de livres, Samuel Brussell (Alphabet Triestin) et sa compagne se sont forgé de profonds souvenirs. Entre la Suisse, l’Italie ou encore la Belgique, l’auteur redessine pudiquement le portrait de celle avec qui il a partagé vie et érudition, et qui s’est éteinte il y a déjà un an de cela.
S’affranchissant de toute chronologie, il laisse libre cours à ses pensées au fil des paysages défilant sous ses pas ou dans sa mémoire. L’extrait d’un roman, une bribe de poèmes ou bien un échange avec un·e ami·e font ressurgir de doux souvenirs. Il se rappelle leur curiosité commune, leurs conversations envolées et habiles, leurs amitiés fraternelles.
“L’amitié et la beauté, la nostalgie à laquelle peut-être ne manque que la chimère du bonheur – sans l’ombre d’un regret -, ce furent nos liens et notre quête, que je fais voeu de poursuivre aujourd’hui.“
Cette superposition mémorielle joue avec les nuances opaques du passé sur lesquelles les chemins de poètes·ses croisent ceux d’écrivain·es. Au gré de ce voyage en clair-obscur, Samuel Brussell couche l’histoire intime des années écoulées où se dessine en creux le portrait d’une femme tant aimée. Lettre à Vouchka irradie de tendresse et de spiritualité, enchevêtre les religions hébraïque et chrétienne, transforme l’absence en une présence lumineuse.
Le deuil n’y est jamais triste, mais ponctué de retrouvailles, de douces commémorations partagées en la réminiscence de celles et ceux dont la mort n’efface en rien l’empreinte qu’iels ont laissée dans les cœurs. Ensemble, iels continuent de faire vivre le souvenir et les mots de celles et ceux parti·es pour l’autre côté, en célébrant leurs danses vibrantes.
Il s’agit d’un carnet de voyage marqué par la paix et le recueillement, bercé par des vagabondages terrestres et symboliques. Chaque détail renvoie à un éclat du passé, les idées vont et viennent sereinement, à la manière des vagues, assemblant le tissage subtil non pas d’une finalité, mais un récit d’amour.
En retraçant le chemin de sa reconstruction personnelle et sensible, Samuel Brussell métamorphose l’absence de l’autre en une présence nouvelle.
Herbier d’émotions et de pensées, Lettre à Vouchka est un hommage délicat, modelé de silences et de partage.
“Tu m’as donné ma liberté
pour être ce que je devais être,
pour devenir ce que je suis.“
Éditions La Baconnière
132 pages
Caroline