Joie et douleur. Espoirs fous et violente désillusion. Tant de sentiments contradictoires que ce manga (quasi-classé dans mon top 5 de l’année) ont provoqué chez moi. L’incroyable “générique” de ce manga nourrit les espoirs les plus fous de tous les otaku de la planète. Au scénario, Mamoru Oshii, réalisateur visionnaire des Ghost In The Shell et des deux premiers Patlabor. Au dessin, Satoshi Kon, génial créateur de Perfect Blue, Paprika et mangaka du très bon Opus (chronique prochainement).
L’humanité est contaminée par une nouvelle maladie. Celle-ci, véhiculée selon les croyances populaires par les oiseaux, provoquent de violentes modifications chez ses victimes. A son stade ultime, ces modifications se manifestent par l’apparition d’ailes chez les victimes. Alors que l’humanité semble avoir abdiqué et que de nombreuses régions du monde sont en état de blocus, l’OMS (grosse puissance mondiale à ce moment-là) décide d’envoyer une dernière mission. 3 “mages” et une petite fille sont envoyé pour remonter la trace de la maladie.
Disons-le tout de suite: l’histoire est géniale! Pleine de profondeur, avec une implication géo-politique incroyablement complexe (tous ceux qui connaissent Ghost In The Shell savent ce dont Oshii est capable à ce niveau-là). Les personnages sont nuancés, pleins de profondeur, de failles et de forces. Tous se retrouvent impliqués à un niveau plus profond que la situation de base ne le laisse supposer.
Les dessins de Satoshi Kon sont d’une épure qui tend à l’infini: beaux, poétiques et tragiques à la fois, Kon se surpasse sur les paysages infinis et désolés des restes de l’empire du Milieu. Certains plans sont d’une magnificence à couper le souffle, compositions magiques et fatalistes qui font jaillir l’onirisme au détour d’une simple page.
A ce moment-là, vous devez être un peu perdus : “il parle de douleur et de désillusions et après il nous dit que le bouquin est génial!” Et bien oui, ce manga est peut-être celui qui m’a le plus marqué de toute ma vie (oui oui je le dis), mais c’est aussi l’une des expériences les plus frustrantes que j’ai pu vivre. En effet cette oeuvre ne connaîtra jamais de fin! Les artistes avaient déjà eu des dissensions , ce qui avait passablement ralenti la sortie. La mort prématurée de Satoshi Kon a achevé de mettre un terme à la suite éventuelle.
Alors il nous reste ce qui sera sans doute la meilleure amorce d’histoire jamais écrite, et surtout personne ne sera jamais déçu par une fin qui aurait pu ne pas satisfaire certains des lecteurs car chacun peut inventer sa conclusion. Alors bien sûr on aurait pu vouloir avoir le fin mot des pistes lancées par Oshii, admirer de nouvelles superbes planches de Kon. Néanmoins si vous êtes prêts à garder nombre de questions sans réponses, alors venez savourer ce pur moment de plaisir qui, malgré les affinités, restera sans lendemain.
Éditions IMHO
240 pages
Jérémy