Depuis plusieurs années déjà, Simone F. Baumann dessine, avec une énergie sombre, son quotidien de jeune adulte anxieuse et hypersensible. En 2015 elle commence à créer 2067, un fanzine autobiographique qu’elle diffuse tous les deux mois. A la même époque, elle se rapproche du collectif zurichois Milk+Wodka et reçoit en 2017 le prix Fumetto du festival de Lucerne pour ses fanzines. Deux ans plus tard elle reçoit le Prix Culturel de la ville de Zurich dans la catégorie littérature.
Simone et moi est un recueil d’histoires tirées de 2067. Il y est question d’anxiété pathologique, de cauchemars, et du fait que marcher sur les lignes du carrelage porte malheur.
Travail sombre, foisonnant et exaltant, Simone et moi est un gros recueil de récits graphiques en noir et blanc. Très peu de texte vient distraire l’œil du dessin, tellement expressif en lui-même. Simone F. Baumann y évoque sa relation âpre avec ses parents. Ils la trouvent folle, elle et eux sont dans des univers parallèles. En témoigne l’histoire au titre délicieusement cynique « Le repas du soir, une histoire d’horreur ».
Il y a aussi les voisins qui ne supportent pas la musique qu’elle écoute, et tout un monde extérieur qui l’agresse et provoque son anxiété. A travers une série de rêves et de terreurs nocturnes, Simone F. Baumann décline ce qui l’angoisse profondément. De la peur de provoquer un incendie en oubliant d’éteindre le feu sous une casserole à la phobie de s’étouffer en mangeant. Ses souvenirs d’enfance, aussi, sont cauchemardesques et chaotiques.
Entre migraines et médication et paranoïa, Simone est seule mais au centre des regards, avec une furieuse envie de s’échapper. A travers ce journal intime, Simone F. Baumann évoque avec force la dépression et les luttes à mener contre soi même. Son dessin est fort et audacieux, il vibre de multiples hachures et fourmille de détails. De l’un à l’autre se révèlent beaucoup de ses références culturelles : Nick Cave, Gatsby le Magnifique et Alf sont disséminés dans le décor. A leurs côtés, Harry Potter, les Télétubbies et Tokio Hotel. En miroir peut-être avec son propre travail, elle laisse traîner un exemplaire de Ask the dust de John Fante.
Simone et moi est une plongée passionnante dans l’univers si particulier de Simone F. Baumann. En espérant un prochain volume traduit en français, vous pouvez suivre la publication de ses fanzines, toujours en cours.
Publié en septembre 2021 par les éditions Martin de Halleux.
Traduit de l’Allemand (Suisse) par Martin de Halleux & Thomas Ott.
352 pages
Label Découverte Jeune Talent France Inter & Prix Delémont’BD de la meilleure première œuvre Suisse de Bande Dessinée 2021.
Amélie